jueves, 7 de mayo de 2009

Paul Verlaine y Antonio de Zayas



El mejor homenaje que haya recibido Antonio de Zayas proviene de Manuel Machado, quien se negó a traducir los sonetos que integran la parte XCVI de Sagesse de Verlaine porque ya existía la "admirable" versión de Zayas, "tan justa, tan exacta y tan verlainiana".
Agreguemos que los dos últimos versos del soneto III superan, en verlainiana musicalidad, al propio Verlaine...

I
Mon Dieu m’a dit : « Mon fils, il faut m’aimer. Tu vois
Mon flanc percé, mon cœur qui rayonne et qui saigne,
Et mes pieds offensés que Madeleine baigne
De larmes, et mes bras douloureux sous le poids

De tes péchés, et mes mains ! Et tu vois la croix,
Tu vois les clous, le fiel, l’éponge, et tout t’enseigne
À n’aimer, en ce monde amer où la chair règne,
Que ma Chair et mon Sang, ma parole et ma voix.

Ne t’ai-je pas aimé jusqu’à la mort moi-même,
Ô mon frère en mon Père, ô mon fils en l’Esprit,
Et n’ai-je pas souffert, comme c’était écrit ?

N’ai-je pas sangloté ton angoisse suprême
Et n’ai-je pas sué la sueur de tes nuits,
Lamentable ami qui me cherches où je suis ? »

II
J’ai répondu : « Seigneur, vous avez dit mon âme.
C’est vrai que je vous cherche et ne vous trouve pas.
Mais vous aimer ! Voyez comme je suis en bas,
Vous dont l’amour toujours monte comme la flamme.

Vous, la source de paix que toute soif réclame,
Hélas ! voyez un peu tous mes tristes combats !
Oserai-je adorer la trace de vos pas,
Sur ces genoux saignants d’un rampement infâme ?

Et pourtant je vous cherche en longs tâtonnements,
Je voudrais que votre ombre au moins vêtît ma honte,
Mais vous n’avez pas d’ombre, ô vous dont l’amour monte,

Ô vous, fontaine calme, amère aux seuls amants
De leur damnation, ô vous toute lumière
Sauf aux yeux dont un lourd baiser tient la paupière ! »

III
— Il faut m’aimer ! Je suis l’universel Baiser,
Je suis cette paupière et je suis cette lèvre
Dont tu parles, ô cher malade, et cette fièvre
Qui t’agite, c’est moi toujours ! Il faut oser

M’aimer ! Oui, mon amour monte sans biaiser
Jusqu’où ne grimpe pas ton pauvre amour de chèvre,
Et t’emportera, comme un aigle vole un lièvre,
Vers des serpolets qu’un ciel cher vient arroser !

Ô ma nuit claire ! ô tes yeux dans mon clair de lune !
Ô ce lit de lumière et d’eau parmi la brune !
Toute cette innocence et tout ce reposoir !

Aime-moi ! Ces deux mots sont mes verbes suprêmes,
Car étant ton Dieu tout-puissant, je peux vouloir,
Mais je ne veux d’abord que pouvoir que tu m’aimes.

IV
— Seigneur, c’est trop ! Vraiment je n’ose. Aimer qui ? Vous ?
Oh ! non ! Je tremble et n’ose. Oh ! vous aimer je n’ose,
Je ne veux pas ! Je suis indigne. Vous, la Rose
Immense des purs vents de l’Amour, ô Vous, tous

Les cœurs des saints, ô Vous qui fûtes le Jaloux
D’Israël, Vous, la chaste abeille qui se pose
Sur la seule fleur d’une innocence mi-close,
Quoi, moi, moi, pouvoir Vous aimer. Êtes-vous fous,

Père, Fils, Esprit ? Moi, ce pécheur-ci, ce lâche,
Ce superbe, qui fait le mal comme sa tâche
Et n’a dans tous ses sens, odorat, toucher, goût,

Vue, ouïe, et dans tout son être — hélas ! dans tout
Son espoir et dans tout son remords que l’extase
D’une caresse où le seul vieil Adam s’embrase ?

V
— Il faut m’aimer. Je suis ces Fous que tu nommais,
Je suis l’Adam nouveau qui mange le vieil homme,
Ta Rome, ton Paris, ta Sparte et ta Sodome,
Comme un pauvre rué parmi d’horribles mets.

Mon amour est le feu qui dévore à jamais
Toute chair insensée, et l’évapore comme
Un parfum, — et c’est le déluge qui consomme
En son flot tout mauvais germe que je semais,

Afin qu’un jour la Croix où je meurs fût dressée
Et que par un miracle effrayant de bonté
Je t’eusse un jour à moi, frémissant et dompté.

Aime. Sors de ta nuit. Aime. C’est ma pensée
De toute éternité, pauvre âme délaissée,
Que tu dusses m’aimer, moi seul qui suis resté !

VI
— Seigneur, j’ai peur. Mon âme en moi tressaille toute.
Je vois, je sens qu’il faut vous aimer. Mais comment
Moi, ceci, me ferais-je, ô mon Dieu, votre amant,
Ô Justice que la vertu des bons redoute ?

Oui, comment ? Car voici que s’ébranle la voûte
Où mon cœur creusait son ensevelissement
Et que je sens fluer à moi le firmament,
Et je vous dis : de vous à moi quelle est la route ?

Tendez-moi votre main, que je puisse lever
Cette chair accroupie et cet esprit malade.
Mais recevoir jamais la céleste accolade,

Est-ce possible ? Un jour, pouvoir la retrouver
Dans votre sein, sur votre cœur qui fut le nôtre,
La place où reposa la tête de l’apôtre ?

VII
— Certes, si tu le veux mériter, mon fils, oui,
Et voici. Laisse aller l’ignorance indécise
De ton cœur vers les bras ouverts de mon Église
Comme la guêpe vole au lis épanoui.

Approche-toi de mon oreille. Épanches-y
L’humiliation d’une brave franchise.
Dis-moi tout sans un mot d’orgueil ou de reprise
Et m’offre le bouquet d’un repentir choisi.

Puis franchement et simplement viens à ma table,
Et je t’y bénirai d’un repas délectable
Auquel l’ange n’aura lui-même qu’assisté,

Et tu boiras le Vin de la vigne immuable
Dont la force, dont la douceur, dont la bonté
Feront germer ton sang à l’immortalité.

***

Puis, va ! Garde une foi modeste en ce mystère
D’amour par quoi je suis ta chair et ta raison,
Et surtout reviens très souvent dans ma maison,
Pour y participer au Vin qui désaltère,

Au Pain sans qui la vie est une trahison,
Pour y prier mon Père et supplier ma Mère
Qu’il te soit accordé, dans l’exil de la terre,
D’être l’agneau sans cris qui donne sa toison,

D’être l’enfant vêtu de lin et d’innocence,
D’oublier ton pauvre amour-propre et ton essence,
Enfin, de devenir un peu semblable à moi

Qui fus, durant les jours d’Hérode et de Pilate
Et de Judas et de Pierre, pareil à toi
Pour souffrir et mourir d’une mort scélérate !

***

Et pour récompenser ton zèle en ces devoirs
Si doux qu’ils sont encor d’ineffables délices,
Je te ferai goûter sur terre mes prémices,
La paix du cœur, l’amour d’être pauvre, et mes soirs

Mystiques, quand l’esprit s’ouvre aux calmes espoirs
Et croit boire, suivant ma promesse, au Calice
Éternel, et qu’au ciel pieux la lune glisse,
Et que sonnent les Angélus roses et noirs,

En attendant l’assomption dans ma lumière,
L’éveil sans fin dans ma charité coutumière,
La musique de mes louanges à jamais,

Et l’extase perpétuelle et la science,
Et d’être en moi parmi l’aimable irradiance
De tes souffrances, — enfin miennes, — que j’aimais !

VIII
— Ah ! Seigneur, qu’ai-je ? Hélas ! me voici tout en larmes
D’une joie extraordinaire ! votre voix
Me fait comme du bien et du mal à la fois,
Et le mal et le bien, tout a les mêmes charmes.

Je ris, je pleure, et c’est comme un appel aux armes
D’un clairon pour des champs de bataille où je vois
Des anges bleus et blancs portés sur des pavois,
Et ce clairon m’enlève en de fières alarmes.

J’ai l’extase et j’ai la terreur d’être choisi.
Je suis indigne, mais je sais votre clémence.
Ah ! quel effort, mais quelle ardeur ! Et me voici

Plein d’une humble prière, encor qu’un trouble immense
Brouille l’espoir que votre voix me révéla,
Et j’aspire en tremblant…

IX
— Pauvre âme, c’est cela !


I
Mi Dios me ha dicho: hijo tienes que amarme. Mira
Mi costado que sangra del corazón la pena;
Mis pies bañar en lágrimas contempla a Magdalena;
Y cual mi amor al peso de tus culpas suspira.

Mira la cruz, los clavos que tu maldad me labra;
Y la hiel que me diste para beber; y aprende
A no amar en el mundo la carne que le enciende
Sino mi Carne y Sangre, mi Voz y mi Palabra.

¿No te amé hasta la muerte con amor infinito?
¿Cual mi hijo en el Espíritu, como en mi Padre a hermano?
¿No sufrí por tu causa conforme estaba escrito?

¿No sollocé contigo todas tus penas bruscas?
¿No el sudor de tus noches sudé en el barro humano?
¡Oh, desgraciado amigo, aquí estoy! ¿No me buscas?

II
Señor, tú mi alma has dicho; mi voz trémula exclama;
Verdad que no te encuentro y en buscarte trabajo;
Pero, ¿cómo he de amarte yo a ti desde tan bajo,
A ti cuyo amor siempre sube como la llama?

Tú que la sed aplacas, Tú, fuente de reposo,
¡Ay, mira, mira un poco mis luchas y querellas!
¿Y seguir osaría de tus pasos las huellas
De rodillas sangrientas de un trepar vergonzoso?

Mas yo quiero buscarte, y te pido de hinojos
Con tu sombra mi oprobio que envuelvas como en nube,
¡Y Tú no tienes sombra! ¡Oh Tú, cuyo amor sube!

¡Oh fuente calma, amarga no más al que se aferra
Al mal! ¡Oh luz diáfana, menos para los ojos
A que a un beso pesado, ay, los párpados cierra!

III
Hay que amarme. Yo soy el beso universal;
El párpado cerrado de tristeza infinita
Que dices tú, mi enfermo; la fiebre que te agita
Soy yo también; a amarme atrévete, mortal.

Soy el amor que sube, que elévase del suelo
A do tu amor rampante de corza no le eleva;
Y él sabrá arrebatarte como el águila lleva
La liebre a las alturas que riega amante el Cielo.

¡Oh noche en que tus ojos alumbra mi paz suma!
¡Oh dulce lecho de agua y luz entre la bruma!
¡Oh sagrada inocencia! ¡Oh sueño placentero!

¡Amor! Palabra sola que quiero que tú exclames.
Soy Dios omnipotente; puedo querer, mas quiero
Poder, antes que todo poder, que tú me ames.

IV
¿Yo, amarte? ¡No me atrevo! ¡No es posible, Señor!
¡Oh! Yo no me atrevo; mi corazón no osa...
¡No quiero! ¡Soy indigno! A Ti que eres la Rosa
Inmensa de los vientos suaves del Amor.

A Ti que de las almas santas eres el foco;
La abeja que se posa de la vida a la puerta
Sobre la flor de una inocencia entreabierta.
¿Quieres que yo te ame? ¡Yo amarte a Ti! ¿Estás loco?

¿Padre, Hijo, Espíritu? ¿Este pecador, yo, cobarde
Soberbio que va haciendo de sus culpas alarde
Y en perpetrarlas sólo toda su vida pasa?

¿Y no hay en sus sentidos, oídos, vista, olfato,
Tacto, gusto, más goce que el arrobo insensato
De una caricia donde el viejo Adán se abrasa?

V
Hay que amarme. ¡Yo soy el loco que decías!
Adán venido para que el hombre viejo coma;
Tu Roma, tu París, tu Esparta y tu Sodoma,
Soy un pobre arrojado entre ruinas sombrías.

Mi amor es el volcán que devora y acaba
Toda carne insensible y que como un perfume
La evapora; es copioso diluvio que consume
En su onda todo el germen del mal que yo sembraba.

Para que al fin un día el Leño fuese alzado
Y que por un milagro de mi bondad probada
Vinieses a mis plantas, tembloroso y domado.

Ama; sal de tu noche. Ama. Sólo he pensado
Desde la Eternidad, pobre alma abandonada,
Que debieras amarme. ¡Por eso aquí he quedado!

VI
Señor, yo tengo miedo, mi alma en mí toda late.
Veo, siento que debo amarte; pero ¿cómo
De tu amado, Dios mío, el alto puesto tomo
Si ante Ti la virtud de los buenos se abate?

Sí... ¿cómo? Ya la bóveda ve hundirse el alma mía
Do el corazón robando iba su enterramiento,
Y siento que a mí fluye el alto firmamento
Y digo: ¿De Ti a mí, Señor, cuál es la vía?

Extiéndeme tu mano; que pueda levantar
Esta carne encogida y el espíritu éste.
Mas ¿podré alguna vez el abrazo celeste

Recibir? ¿Algún día me podré yo apoyar
Sobre tu corazón amante, que fue el nuestro,
Como apoyó el Apóstol su frente en el Maestro?

VII
Si merecerlo quieres, hijo mío, está cierto.
Deja ir de tu alma la ignorancia dudosa
A los abiertos brazos de mi Iglesia gloriosa,
Como el lirio arrebata del lirio el azul muerto.

Acércate, y con voz dulce y grave a mi oído
La humillación esparce de una noble franqueza,
Y sin una palabra de orgullo o de fiereza
Ven a ofrecerme el ramo de un dolor bien sentido.

Luego llega tranquilo a mi mesa adorable
Para allí bendecirte con manjar deleitable
Que verá, sin probarlo, del Ángel la beldad.

Y beberás tú el vino de la viña inmutable
Y por su fortaleza y dulzura y bondad
Germinará tu sangre a la Inmortalidad.

***

Después una fe guarda modesta en el Misterio
De amor por el que soy tu Carne y tu Razón,
Y sobre todo siempre frecuenta mi Mansión
Para tomar el vino que del mal es cauterio.

El Pan sin el que es la Vida una traición,
Y rogar de mi Padre, respetando el Imperio,
A mi Madre tornarte en este cautiverio,
El Cordero que entrega sin ayes el vellón.

Ser el Niño vestido de lino y de inocencia,
Olvidar su misérrimo amor propio y tu esencia,
Ser, en fin, un ser nuevo, ser semejante a mí;

A mí que allá en los días de Herodes y Pilatos,
De Judas y de Pedro, fui semejante a ti,
Y muerto cual bandido por Israel ingrato.

***

Y por recompensar tu celo en tus deberes
Tan dulces que parecen inefables delicias
Gustar te haré en la tierra mis suaves primicias,
La paz, y de ser pobre los sencillos placeres.

Mis noches misteriosas que el corazón serenan
Y el aroma difunden que el cáliz santo exhala,
Cuando se ve en cielo que la luna resbala
Y los solemnes ángelus rojos y negros suenan.

Y la resurrección en mi luz esperando
Irás de caridad el insomnio gustando
Y de mis alabanzas la orquesta que no acaba.

Y el éxtasis perpetuo y la inefable ciencia
De estar conmigo entre la amable transparencia
De tu dolor que como si fuese mío amaba.

VIII
¡Ah!, Señor, ¿qué me pasa? Heme aquí todo llanto
De penosa alegría y de dulce aridez;
Porque tu voz me hace bien y mal a la vez
Y tiene el bien y el mal para mí el mismo encanto.

Río, lloro, y el toque de un clarín me provoca
A la lid por campiñas do alzados en paveses
Blancos y azules ángeles van con áureos arneses,
Y ese clarín me llena de una arrogancia loca.

De escogido el valor y el miedo siento en mí;
Indigno soy, más sé que es tu bondad inmensa.
¡Ah, Señor, cuánto esfuerzo, cuánto ardor!, y heme aquí

De una humilde arrogancia lleno y angustia intensa
Me turba la esperanza de llegar a tus pies
Y temblando suspiro.

IX
Pobre alma, ¡eso es!



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